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ONDE DE CHOC À LA RÉSIDENCE PLACE PRIMEVÈRE

JEAN-FRANÇOIS GUILLET jean-francois.guillet@lavoixdelest.ca

Les fermetures de résidences pour personnes âgées se succèdent en Estrie. Après le Riverain et Les 3 Sphères à Granby, voilà que le seul établissement pour personnes autonomes et semi-autonomes à Waterloo, Place Primevère, cessera définitivement ses opérations à la fin juin. Un coup dur pour la quarantaine de personnes qui y habite et le personnel.

Pleurs, détresse, amertume, consternation. Les résidents et leurs proches sont passés par toute une gamme d’émotions lorsque la nouvelle est tombée, telle une douche froide, mardi après-midi. Et plusieurs employés n’en mènent pas large.

« Les résidents ici, ce sont comme une seconde famille. Tout le monde est démoli par la fermeture. C’est comme un cauchemar. Ça me prend aux tripes. Bien des gens n’auront pas les moyens de payer la facture ailleurs. Vraiment, ça brise le coeur. Sans compter que je vais perdre un travail que j’aime », lance une des membres de l’équipe, la voix étreinte par l’émotion, préférant taire son identité pour éviter des représailles de l’employeur.

Tous les autres membres du personnel qui ont accepté de se confier à La Voix de l’Est sont sur la même longueur d’onde que leur collègue. « On se doutait qu’il allait se passer quelque chose. Le propriétaire n’investissait vraiment dans rien ici. On pensait possiblement qu’il allait vendre, mais pas fermer. On est sous le choc. Pour nous, les employés, mais surtout pour les résidents », clame une autre personne qui travaille à la résidence.

La cuisinière de l’endroit, Susan Romaine, se dit inquiète pour son avenir et celui des dizaines de personnes âgées qui seront ainsi déracinées. « C’est inhumain ce qui se passe ici. Où les gens iront-ils habiter ? Et à mon âge, où je vais trouver du travail ? indique la femme de 58 ans. J’ai fait du camionnage pendant presque toute ma vie, mais je ne peux plus faire ça. » GOUFFRE FINANCIER Louise C. Malouin réside à Place Primevère depuis près d’un an. Elle déplore le « manque d’empathie » de la direction de l’établissement et de son propriétaire, le pharmacien montréalais Quang Thai Lam.

« On vit dans un monde de fou. Ils vont vendre cette bâtisse ou la démolir pour construire des condos pour les riches. Les hommes d’affaires pensent juste à la piastre, rage la volubile dame de 85 ans. Mais ici, le monde est complètement au dépourvu. C’est une catastrophe cette annonce. Carrément épouvantable. »

Le maire de Waterloo, Jean-Marie Lachapelle, déplore également cette décision du propriétaire, qui se dessine selon lui comme « une fermeture sauvage ». « C’est un endroit unique à Waterloo. C’est un drame pour les résidents et toutes les personnes d’ici », ditil, soulignant à grands traits qu’il faut remuer ciel et terre pour que l’immeuble garde sa vocation de résidence pour personnes âgées.

Selon le directeur de l’établissement, Mathieu Bélanger, la résidence devenait de mois en mois un gouffre financier. Ce qui a mené le propriétaire à stopper l’hémorragie en annonçant la fermeture.

« On est sur le respirateur artificiel depuis 2021. Les assurances ont augmenté de 25 % depuis les six derniers mois. Le prix de la nourriture qui grimpe sans arrêt. Et on n’arrive pas à remplir la résidence (qui compte une soixantaine de chambres) depuis 2019. On doit injecter de gros montants juste pour assurer les frais d’opération normale. On parle de 15 000 $ à 17 000 $ par mois. »

M. Bélanger dit avoir travaillé de concert avec le CIUSSS de l’Estrie pour dénouer l’impasse, en vain. La fermeture aura donc lieu le 28 juin et l’immeuble est à vendre, confirme le directeur. La valeur foncière totale de l’immeuble de la rue Leclair s’élève à un peu plus de 2,1 M $, soit 1,8 M $ pour le bâtiment, construit en 1973, et environ 290 000 $ pour le terrain.

Jean-Marie Lachapelle remet en question la gestion de l’établissement et son entretien. « Ce n’est pas la Ville qui gère la bâtisse, qu’il qualifie de potable. Ils [les administrateurs] disent qu’ils ne font pas d’argent. Mais, il y a des réparations qu’ils n’ont jamais faites. (...) Depuis plusieurs années, on a des problèmes à cette résidence. C’est pour cette raison que le service des incendies a dû intervenir à de multiples reprises. »

Le directeur du service des incendies de Waterloo, Patrick Gallagher, corrobore les propos du maire. « Le bâtiment présente des anomalies corrigeables. Il suffisait simplement que le propriétaire pose des actions », mentionne-t-il, affirmant que l’endroit est assez sécuritaire pour ne pas ordonner son évacuation.

Il évoque des anomalies structurelles, notamment au niveau du parement de brique extérieur. Idem en ce qui concerne des équipements d’urgence et la formation du personnel, entre autres. La Ville a même dû faire appel au tribunal pour faire avancer le dossier, fait-il valoir.

SOUTIEN

Le maire de Waterloo se dit « très déçu » et « peiné » par la tournure des événements. Il souhaite obtenir le soutien dans le dossier de la députée provinciale de BromeMissisquoi, Isabelle Charest, notamment pour trouver des solutions pour éviter une fermeture.

De son côté, le CIUSSS de l’Estrie dit être à pied d’oeuvre depuis l’annonce pour appuyer les résidents et leurs proches. « Nous prenons en charge la relocalisation des résidents qui le requièrent pour nous assurer que leur nouveau milieu corresponde à leurs besoins. Une évaluation est d’ailleurs en cours par les intervenants de notre établissement affectés à la RPA », indique le département des communications par courriel.

« Dans une situation de fermeture de RPA, ajoute le CIUSSS, notre établissement est en soutien à la ressource en question pour nous assurer de la sécurité des résidents et que les services d’assistance personnelle soient maintenus jusqu’à la fermeture. »

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