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Bières

UNE LAGER MEXICAINE ?

PHILIPPE WOUTERS CHRONIQUE philippe@bieresetplaisirs.com

Nouveau style, apparu depuis peu au Québec, la lager mexicaine fait son grand retour dans le domaine des bières artisanales. Mais qu’est-ce qu’une lager mexicaine ?

La plus célèbre des lager mexicaine est, sans aucun doute, la Corona. Mais connaissez-vous la Tecate, Modelo, Dos Equis, Sol ou Victoria ? Autant de lager mexicaines, brassées par des grands groupes industriels et vendus au Mexique, mais également partout dans le monde. On les reconnait pour leur faible teneur en houblon, leur corps aqueux et la faible proportion de malt d’orge, comparé à des lagers allemandes, par exemple.

Des bières de soif, dans la plus « pure » tradition du genre. La lager mexicaine est si populaire, qu’elle est dorénavant devenue un style, adopté par les microbrasseries. Il est amusant d’y voir encore un phénomène cyclique de retour du balancier : les microbrasseries se sont souvent éloignées des profils organoleptiques des bières brassées par les grands groupes brassicoles, pour aujourd’hui s’en inspirer et brasser des bières afin de concurrencer les parts de marché des mêmes grands groupes brassicoles. Pour un chroniqueur de marché de la bière comme moi, c’est un véritable terrain de jeu.

Mais revenons à notre lager mexicaine. Il faut considérer le caractère aromatique de la bière, mais également le caractère historique du style. Au Mexique, on y brasse de la lager parce que les brasseurs mexicains ont appris de brasseurs allemands, au siècle dernier. L’Allemagne brassicole a beaucoup influencé le sud des Amériques. Au fil du temps, les brasseurs mexicains ont développé une expertise de brasser des bières blondes, à la finale légère et à la « buvabilité » sans compromis. C’est justement ce qui intéresse les microbrasseurs d’aujourd’hui en brassant des lager blonde fermentées par des levures de lager provenant du Mexique.

Mais la buvabilité du produit ne tient pas uniquement qu’à sa levure, il faut également considérer utiliser des céréales autres que l’orge pour s’assurer d’avoir une bière la plus aqueuse possible. Voilà pourquoi l’utilisation de maïs, en grande proportion, permet d’aller chercher cette buvabilité dans la bière.

Ceci dit, si on se penche un peu plus sur le phénomène, on se rend compte qu’être une lager mexicaine, dans le monde de la microbrasserie, c’est un petit peu plus complexe que d’utiliser une levure mexicaine et du maïs. Certaines lager mexicaines contiennent du malt caramélisé, rappelant les lagers du 20e siècle, bien avant l’arrivée des grands groupes brassicoles. L’ajout de lime et de sel, par exemple, est également source d’inspiration pour plusieurs lagers mexicaines. Les caractéristiques du style sont donc très larges.

La lager mexicaine est à la bière nord-américaine, ce que la bière d’abbaye est à la bière belge. On s’inspire d’un élément du Mexique en soulignant son attachement culturel, sans trop se soucier réellement du respect d’un cahier des charges qui n’existe pas, tellement les sources d’inspiration sont multiples. Le « style » est assez nouveau également, mais n’est-il pas légion, dans la culture bière d’aujourd’hui, de rassembler plusieurs sources d’inspiration ou techniques de brassage sous le même nom ? « IPA », « rousse », « lager blonde » et j’en passe. L’avenir nous le dira, comme à chaque fois.

LEMAG.

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2021-09-18T07:00:00.0000000Z

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