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SUIVRE SON INSTINCT

VALÉRIE MARCOUX vmarcoux@lesoleil.com

Jorane n’a pas peur de présenter Hemenetset comme le projet le plus ambitieux de sa carrière. Plus qu’un album de musique, c’est la trame sonore d’un univers qu’elle dévoile et qui prendra sa forme finale en spectacle.

La musique qu’offre Jorane nous transporte très loin pour finalement nous ramener à soi. Des Nébuleuses

I et II aux Tectoniques, le thème de

La beauté sauvage de la féménitude — titre de la dernière pièce de l’album — apparaît au fil de cette

Errance symphonique.

« J’ai envie de cette vastitude du cosmos, autant que de l’infinie petitesse de la particule. […] J’ai l’impression d’entrer dans un nouveau tome de ma création avec un projet comme ça. Je ne le vois vraiment pas comme le même genre de projet que j’ai pu faire dans le passé », affirme la compositrice et interprète en entrevue avec Le Soleil.

Dans ce projet d’envergure travaillé depuis six ans, l’artiste a suivi son instinct. Le thème de la « féménitude » est d’ailleurs une invitation à renouer avec l’intelligence instinctive. « Je pense que cet appel au retour des valeurs féminines en avant-plan mérite toute l’attention en ce moment et mérite qu’on voie cette beauté, cette grandeur de création qui est déjà à l’intérieur de nous. […] Pour moi, la “féménitude” est présente autant chez l’homme que chez la femme », explique la créatrice.

Jorane a mis des « tempêtes de sable » dans Hemenetset, de « grosses vagues », « une forêt luxuriante avec des fleurs », « des chutes » : « Il y a la sécheresse et il y l’abondance en même temps, il y a l’apesanteur et la lourdeur ; les contrastes sont très présents dans cet album », souligne-t-elle.

« La nature fait partie d’un des trois liens sacrés que j’ai envie de représenter dans cette oeuvre, mais aussi dans ma vie. Ces trois liens étant le lien à l’autre, le lien à soi et le lien à la nature. » Une trinité bien verbalisée par Abdennour Bidar dans son livre

Les tisserands, précise Jorane. Bien que la matrice de cet univers soit musicale, le projet s’exprime à travers plusieurs formes d’art. « C’est de la musique que part cette énergie qui va ensuite se décliner dans l’éclairage (Atomic3), dans le mouvement (Deborah Brown), dans les costumes (Julie Charland), etc. » énumère celle qui s’est entourée de plusieurs collaborateurs.

Notamment, François Blouin avec qui elle s’associe pour la mise en scène. « C’est quelqu’un qui est à l’affût de tout ce qu’on pourrait vouloir créer avec les nouvelles technologies », affirmet-elle. Il travaille d’ailleurs sur un clip en réalité augmentée (AR) pour la pièce Nouvelle novembre et c’est à lui qu’on doit l’herbier [lestectoniques.ca] des Tectoniques, un morceau de 10 minutes présenté sur une page Web où les visiteurs activent librement chaque élément qui la compose par l’entremise de dessins de fleurs.

« Si la musique ne joue pas, cette fleur ne danse pas. Elle va réagir à la musique qui est commandée par la partie musicale qu’elle représente. […] Avec des pièces de dix minutes, on ne pouvait pas faire des clips classiques, car ça devient un court-métrage rendu là », explique Jorane.

La technologie fait maintenant partie prenante des créations de la compositrice qui joue de la harpe, du violoncelle et de sa voix dans cet album. Comme dans des productions antérieures, les mots s’effacent pour laisser la place aux sons qui ne cherchent pas l’esthétisme à tout prix, mais plutôt le pouvoir de l’évocation.

« Parfois, on a des sons plus gutturaux, des sons qui sont dans la racine, dans la terre. D’autres fois, on a des sons plutôt dans la dentelle, dans la lumière ; l’objectif est d’avoir accès à ces contrastes afin d’évoquer le maximum d’émotions », explique-t-elle.

LA PIÈCE MÈRE

C’est par ce processus qu’est né

Hemenetset. « Ce son “hemenetset” arrivait au même endroit de façon très concrète et revenait pareil tout le temps. C’est vraiment devenu un moment très important parce qu’il se trouve être dans la dernière pièce, qui est un peu la pièce qui regroupe toutes les autres, la pièce mère, la conclusion. Pour moi, “hemenetset” est devenu un mot, c’est devenu ce projet au complet. C’est un mot qui s’incante à l’impératif, qui est un appel à l’ultime expression de soi. »

Jorane est très reconnaissante des personnes qui ont partagé sa curiosité artistique et développé l’univers qu’elle voulait faire émerger (notamment, Geneviève Clermont, Vanessa Marcoux, Lana Tomelin, Sophie Coderre, Mathieu Désy, Martin Lizotte, Geneviève Toupin, Chloé Lacasse, André Simard, Marc Bell). Dans la dernière année, Marc Bell et elle ont accumulé 100 jours de studio pour cet album.

« Marc est un réalisateur compositeur de projets multimédia à grand déploiement, je savais qu’il n’aurait pas peur de l’architecture musicale que j’allais proposer et qu’il allait, avec moi, plonger dans cet univers avec curiosité et patience », affirme Jorane. Avec lui, elle a travaillé un son « froid », aérien, inspiré notamment par Johann Johannsson, Björk et Sigur Rós.

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2021-09-18T07:00:00.0000000Z

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